C’est toujours un problème de voir les succès des méchants. David exprime la certitude que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment et craignent Dieu. Les autres semblent fleurir quelque temps, mais leur bonheur ne peut être que passager.
Clément Marot (1998) – Strasbourg, Genève, 1542 / Genève, 1551
1. Ne sois pas fâché si durant cette vie
Souvent tu vois prospérer les méchants ;
Aux biens qu’ils ont ne porte pas envie,
Car les trompeurs à la fin trébuchants
Seront fauchés comme une avoine prête,
Et sécheront comme l’herbe des champs.
Tu resteras au pays pour longtemps
Dans un foyer où sa paix se reflète.
Fais du Seigneur tes délices constants ;
Tous les souhaits que ton coeur voudra faire
Seront remplis par son affection.
3. Remets à Dieu ton sort et tes affaires,
Aie confiance en Lui ; il conduira
Ce que tu veux accomplir et parfaire,
Et ta justice au grand jour paraîtra.
Le moment vient où ton action bonne
Comme un midi partout resplendira.
4. Laisse Dieu faire, espère et ne te donne
Aucun souci, regret ni déplaisir
Devant le gain de cyniques personnes.
Ne laisse pas le dépit tʼenvahir.
Quitte ces gens ; tu nʼas pas avantage
A mal agir en suivant leurs désirs.
5. Sur les pervers fondra bientôt lʼorage ;
Ceux qui sʼattendent à Dieu constamment
Possèderont la terre en héritage,
Mais lʼhomme faux tombe soudainement.
Où trônait-il dans sa gloire éphémère ?
Tu nʼen vois plus de trace seulement.
6. Les hommes doux hériteront la terre,
Ils connaîtront sans quʼon trouble leur paix
Tout le bonheur quʼattend un coeur sincère.
En vain veut-on leur faire un sort mauvais :
Lʼhomme pervers, grinçant des dents, machine
Contre le juste un funeste projet.
7. Pendant ce temps la majesté Divine
Rit du méchant, car de ses yeux ouverts
Dieu voit venir le jour de sa ruine.
Contre le pauvre on verra les pervers
Tendre leur arc et tirer leur épée,
Ils ont promis au juste un sort amer.
8. Mais tant de haine à la fin est trompée,
Leur propre épée entre dans ces coeurs faux,
Lʼarc est brisé ; fin de leur équipée.
Certes, le peu de lʼhomme juste vaut
Mille fois mieux que la riche abondance
Des criminels qui sʼélèvent si haut.
9. Le bras impie et toute sa puissance
Seront brisés. Mais cʼest le Dieu du ciel
Qui donne au juste une pleine assistance.
Cʼest Lui qui tient en son soin paternel
Les jours de ceux dont lʼâme est innocente ;
Leur héritage est vraiment éternel.
10. Ils ne sont pas frustrés de leur attente
Au mauvais temps ; ils sont rassasiés
Aux plus longs jours de famine dolente,
Mais les méchants périront désolés ;
Les ennemis de Dieu vont en fumée
Comme la chair des agneaux immolés.
11. Voici leur main, mendiante affamée
Qui ne rend pas. Les justes montreront
De quel amour leur vie est animée.
Oui, les bénis de Dieu possèderont
Finalement la terre avec sa graisse,
Tandis que les maudits succomberont.
12. Dieu raffermit les fidèles sans cesse
Sur le chemin auquel il prend plaisir,
Et sa faveur lʼaplanit et le dresse.
Lʼhomme parfois sent ses forces fléchir,
Mais sʼil trébuche accablé de tristesse,
La main de Dieu viendra le soutenir.
13. Jʼai été jeune et voici la vieillesse :
Je nʼai pas vu le juste abandonné,
Ni ses enfants mendier dans la détresse.
Mais chaque jour il ne fait que donner,
Prêter, nourrir ; aussi voit-on sa race
Suivre lʼexemple et le sort des aînés.
14. Fuis donc le mal, suis le bien à la trace ;
Demeure ainsi un temps illimité.
Le Seigneur Dieu te fera cette grâce
Car en tout temps il aime lʼéquité.
Il nʼabandonne aucun de ses fidèles,
Mais il détruit les fils dʼiniquité.
15. Les hommes droits dans la joie essentielle
Possèderont la terre qui produit,
Et pour toujours habiteront en elle.
Le juste par sa bouche nous instruit
Dans la sagesse, et sa langue nʼexpose
Rien qui ne soit très juste et plein de fruit.
16. Car dans son coeur la Loi de Dieu repose ;
Aussi son pied ne sera pas glissant,
Si haut que soit le but quʼil se propose.
Il est bien vrai quʼon guette lʼinnocent
Et quʼon voudrait le faire disparaître,
Hélas, lʼimpie en ce monde est puissant !
17. Mais lʼhomme droit, Dieu ne veut pas permettre
Quʼil soit livré aux mains des malfaiteurs,
Ni condamné, accusé par des traîtres.
Mets fermement ta foi dans le Seigneur,
Marche avec Lui ; sur la terre féconde
Tu grandiras, mais le méchant se meurt.
18. Jʼai vu lʼimpie émerveiller le monde,
Il sʼétendait grand et haut, verdissait
Comme un laurier dont les rameaux abondent.
Jʼai repassé par où il fleurissait,
Il nʼétait plus, je cherchais son feuillage,
Même la souche aux yeux disparaissait.
19. Garde le droit, observe lʼhomme sage ;
On ne voit pas sʼéteindre son foyer,
Un avenir de paix est son partage.
Mais les méchants prompts à se fourvoyer,
Les révoltés ont un autre salaire ;
Finalement ils seront foudroyés.
20. Oui, le salut des fidèles sincères
Vient du Seigneur, et cʼest Lui qui sera
Toujours leur force au temps dur et contraire ;
Il les secourt, il les délivrera.
Oui, le Seigneur les sauve et les libère,
Parce quʼen Lui chacun dʼeux espéra.
Psautier de Genève (1998)
Les Psaumes de David. Clément Marot. Adaptation en français actuel par Marc-François Gonin. ISBN 2-911069-29-3. Éditions VIDA. 1998. Reproduit avec permission.
